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Dix choses à savoir sur Fortunat Biselele, l’ex-conseiller privé de Félix Tshisekedi

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Il était jusqu’à présent l’un des hommes les plus puissants de RDC. Entendu à l’Agence nationale de renseignements (ANR) depuis le 14 janvier, Fortunat Biselele a été démis de ses fonctions de conseiller du président.

DIX CHOSES À SAVOIR SUR – C’est l’histoire d’une chute retentissante. Il y a six jours encore, Fortunat Biselele, 51 ans, était l’un des hommes les plus influents du régime de Félix Tshisekedi. Il a suffi d’une convocation à l’Agence nationale de renseignements (ANR) pour que le conseiller privé du président perde son pouvoir.

Interrogé sur des sujets sécuritaires et financiers par les services de Jean-Hervé Mbelu Biosha depuis le samedi 14 janvier (il pourrait prochainement être transféré à la prison centrale de Makala), celui que tout le monde surnomme « Bifort » a été démis de ses fonctions quelques heures plus tard. Le chef de l’État a ainsi décidé de se séparer d’un de ses proches, qui le suit depuis vingt ans et qui fut longtemps l’un de ses principaux intermédiaires avec le Rwanda de Paul Kagame.À LIREExclusif – En RDC, Fortunat Biselele, jusqu’alors puissant conseiller de Félix Tshisekedi, entendu à l’ANR

1 – Alain Foka

Une vidéo réalisée le 6 janvier par le producteur camerounais Alain Foka semble avoir été l’élément déclencheur de l’arrestation de Fortunat Biselele. Le conseiller privé était exceptionnellement sorti de sa réserve pour révéler la teneur de négociations passées entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame.

Selon Biselele, le président congolais a fait une proposition à son homologue rwandais en ces termes : « Nous sommes un pays riche, nous sommes des voisins et aucune guerre ne fera déplacer nos frontières, nous sommes des voisins à vie. Moi je vous propose de mettre ensemble des projets où nous allons jouer gagnant-gagnant. J’ai des minerais chez moi qui vous intéressent. Avec votre carnet d’adresses, vous pouvez contacter des investisseurs à travers le monde et nous allons travailler ensemble pour développer la zone ensemble. »

Il ajoute : « Le président Kagame était tout à fait partant. On a beaucoup avancé jusqu’à ce que des intérêts obscurs conduisent à la situation telle qu’elle est aujourd’hui. » Ces révélations sont d’autant plus sensibles que désormais Kinshasa estime être en état de guerre contre Kigali, qu’elle accuse de soutenir directement la nouvelle offensive du M23 dans l’est de la RDC.À LIRERDC : ce que dit le rapport de l’ONU qui accuse le Rwanda de soutenir le M23

2 – Rwanda

Depuis l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi, Fortunat Biselele était l’un des principaux intermédiaires entre le pouvoir de Kinshasa et celui de Kigali, un rôle qui s’est encore renforcé avec l’arrestation de François Beya, en février 2022.

Dans la vidéo enregistrée avec Alain Foka, il précise d’ailleurs « avoir été à Kigali à plusieurs reprises, envoyé par le président Tshisekedi ».

3 – RCD-Goma

Fortunat Biselele a noué ses contacts avec l’appareil sécuritaire rwandais du temps où il était membre du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD-Goma). Il a intégré ce groupe armé au début des années 2000 par l’entremise d’Eddy Ngarambe Muzira, et contrairement à ce qui est souvent avancé, il n’y était « pas stricto sensu en charge du renseignement », selon un ancien haut responsable de ce mouvement soutenu par Paul Kagame. « Il faisait un peu de renseignement comme tout le monde, mais ce n’était pas un haut cadre. » Il a également fait partie du service du protocole du groupe armé.

4 – Commerce

Avant d’entrer au RCD, Fortunat Biselele travaillait dans un petit commerce de Goma, la grande ville de l’est de la RDC. Il y revendait des vêtements contrefaits achetés en Italie. La boutique appartenait à un certain Donado, le frère de Don Pierrot Lukanda Sadiki, un proche de Moïse Katumbi.À LIREMoïse Katumbi : « Ma candidature à la présidentielle de 2023 en RDC est définitive »

5 – Moïse Katumbi

Fortunat Biselele sera d’ailleurs un temps proche du businessman katangais. Après la rupture entre Moïse Katumbi et Joseph Kabila en 2015, « Bifort » se rapproche de l’ancien gouverneur du Katanga pour lequel il joue notamment les émissaires auprès d’Étienne Tshisekedi, alors leader de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).

6 – Kasaï

Kasaïen originaire de Kananga, Biselele fait la connaissance d’Étienne Tshisekedi à l’époque du RCD-Goma. En raison de leurs origines communes, il est chargé par son mouvement de gérer les relations avec celui qui est alors le leader emblématique de l’opposition, lors de ses venues à Goma et au Rwanda. C’est à cette époque qu’il se lie avec le fils de ce dernier, Félix.

7 – Conseiller privé

Une vingtaine d’années plus tard, alors que Félix Tshisekedi vient de devenir président de la RDC, Fortunat Biselele est nommé conseiller privé du chef de l’État – nous sommes en février 2019. Très vite, il joue un rôle de premier plan au palais présidentiel. Quelques mois plus tard, il est en outre nommé à la tête de l’Office privé du chef de l’État, qui chapeaute la Maison civile et le bureau du conjoint.

Bifort est en effet proche de Denise Nyakeru Tshisekedi. Sa femme, Sarah Agnelli, occupe un poste au sein de la fondation de la première dame.

8 – Guerre de palais

Décrit parfois comme un « faucon », « Bifort » était jusqu’à sa chute l’un des acteurs majeur de la « guerre de palais » qui se joue autour de Félix Tshisekedi. Fin 2021, il s’était notamment opposé à Corneille Nangaa, l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) sous Joseph Kabila, et à José Mpanda, ministre de la Recherche scientifique et de l’Innovation, avec lesquels il se disputait un carré minier situé en Ituri.

Selon certaines sources, cette affaire a scellé le sort de François Beya, ancien conseillé sécurité de Félix Tshisekedi. Celui-ci était intervenu contre les intérêts de Biselele.À LIRERDC : Beya, Biselele, Nangaa… Discrète guerre de palais dans le premier cercle de Tshisekedi

9 – Pétrole

Biselele avait aussi un intérêt pour les dossiers pétroliers – il a un temps travaillé dans le secteur au milieu des années 2000. Après avoir été assistant d’Azarias Ruberwa, l’ex-vice-président du RCD-Goma nommé vice-président de la RDC dans le gouvernement de transition (2003-2006), il obtient un poste d’administrateur dans la société sud-africaine Dig Oil. « C’était notre politique : on tentait de placer nos hommes à de bons postes pour les remercier de leur investissement », explique un ancien cadre du groupe armé.

10 – Déjà-vu

Dans le régime de Tshisekedi, il semble risqué d’être considéré comme un homme puissant. Comme Fortunat Biselele, d’autres avant lui ont connu une violente disgrâce.

Vital Kamerhe, que l’on présentait comme un omnipotent directeur de cabinet, fut arrêté en 2020, condamné à 20 ans de prison avant d’être acquitté deux ans plus tard.À LIRERDC : à quelles conditions Vital Kamerhe a-t-il été libéré ?

Jean-Marc Kabund-a-Kabund, président intérimaire de l’UDPS, parfois surnommé le « vice-président de la République », fut destitué en janvier dernier. Il est depuis incarcéré à Makala, notamment pour « outrage au chef de l’État ».

Enfin, François Beya, incontournable conseiller sécurité de Félix Tshisekedi, a obtenu de pouvoir suivre des soins à l’étranger après plusieurs mois passés en prison. Il avait été arrêté en février 2022 pour « agissements contre la sûreté nationale ». Plusieurs chefs d’État africains avaient alors plaidé pour qu’il soit remis en liberté.

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